Je recommande “Notre patience est à bout, 1792-1793, les écrits des Enragé(e)s” (Editions immho 243pp 15€).
Dans ce livre de citations, Claude Guillon, un historien anarchiste spécialiste des sans-culotte et du mouvement populaire des Enragés à gauche de la Commune de Paris en 1792-1794, note qu’ils sont certes connus par les personnalités de Hébert, Roux, Varlet, Leclerc mais à son avis très sous-estimés par les grands historiens de gauche, Jean Jaurès (Histoire socialiste de la Révolution française, 1904, messidor), Albert Mathiez (La vie chère et le mouvement social sur la Terreur, 1927) et aussi par Marx qui, faute de temps probablement, ne traite pas vraiment de l’action des Enragés dans La Sainte Famille (1844).
Guillon démontre en effet dans ce livre, que les Enragés se sont beaucoup intéressés à la représentation du peuple et notamment au mandat impératif, révocable à tout moment.
Il note surtout qu’ils sont souvent allés beaucoup plus loin qu’on ne le pense dans la voie qui ménera au socialisme, et notamment qu’ils ont poussé la Convention et le Comité de salut public à des mesures plus favorables au peuple qu’ils ne l’envisagent.
La citation ci-dessous de la déclaration du 19 novembre 1792 à la Convention d’une députation du corps électoral de Seine-et-Oise, (inspirée probablement en partie par Rousseau Hidins “Citoyen français de Lyon”) ouvre directement et consciemment le champ de la lutte contre la classe bourgeoise :
“Citoyens, le premier principe que nous devons vous exposer est celui-ci : “La liberté du commerce des grains est incompatible avec l’existence de notre République” Cette classe de capitalistes et propriétaires, par la liberté illimitée, maîtresse du prix des grains, l’est aussi de la fixation de la journée de travail ; car chaque fois qu’il est besoin d’un ouvrier, il s’en présente dix, et le riche à le choix ; or, ce choix, il le porte sur celui qui exige le moins ; il qui fixe le prix et l’ouvrier se soumet à la loi, parce qu’il a besoin de pain et ce besoin ne se [reporte] pas pour lui. Ce petit nombre de capitalistes et de propriétaires est donc maître du prix de la journée de travail. La liberté illimitée du commerce des grains le rend également maître de la subsistance de première nécessité […]
“Interdisez le commerce des grains à tout autre qu’aux boulangers et meuniers… Anéantissez les grands corps de ferme qui concentrent dans les mains coupables des quantités considérables de grains…” (Archives parlementaires 1792).
JRK